Cette newsletter est inspirée par une lectrice très particulière qui m’a dit : “tu devrais faire un book club aka raconter tes livres préférés puisque tu notes tout ce que tu lis.” Je ne suis pas sûre que ce soit là la définition d’un book club, mais si vous partagez quelques lectures ou votre avis sur les miennes, ça peut le devenir.
J’aime savoir ce que les autres lisent. Et j’aime avoir leur opinion, constructive et pas forcément toujours ultra positive, car, non, tous les livres ne changent pas notre vie et c’est tant mieux. Deleuze a beau avoir dit qu’il était plus fertile de penser “pour”, c’est en fait une citation mal citée ou du moins mal appliquée quand on voit la critique fine (et corrosive) dont il était capable. Penser pour, cela ne veut pas dire ne parler que « positivement ». Penser pour, c’est peut-être simplement penser pour construire, réfléchir et cette pensée est - forcément -critique.
Les livres que je mentionne ici :
ne sont que les livres que je lis sans visée « utilitariste ». Je n’y mentionne pas les livres que je lis pour mon travail, à moins d’avoir eu une révélation (apocalypse?) en les lisant. La frontière est donc perméable.
sont tous des livres achetés par mes soins.
excluent les livres commencés, mais pas finis.
j’ai mis en gras ceux que j’ai préférés.
A garder en tête, les critiques sont pour les lecteurices, pas pour les auteurices, que l’on s’entende. Si ça vous fend le coeur de lire un avis qui n’est pas “ce livre m’a chamboulé”, il vaut mieux passer votre chemin.
Janvier 2024:
J’avais une grosse échéance mi-janvier (et des millions de copies), j’ai donc beaucoup lu pour le travail. Dans ce cas, je cherche des livres qui vont me détendre sans me froisser un neurone. Et un livre qui détend, c’est très difficile à trouver.
Fourth Wing, Rebecca Yaros (romantasy) : horrible, j’essaie de lire ce dont mes étudiant·e·s parlent. Douloureux au point où je me suis demandée si c’était une parodie. Twilight rencontre Vampire academy rencontre Eragon. (Mais en moins bien). Révélation à la fin du livre : c’est, bien sûr, écrit par une mormone.
Shift (deuxième tome de Silo), Hugh Howey (SF): trop de #notallmen. Les atermoiements de Matt/Dan/ <insert a white dude name> qui se télescopent avec des explications ratées pour la raison du silo = j’ai donc remis la lecture du 3e tome à plus tard.
Ted, drôle de Coco, Emilie Gleason (BD) : Etrange et charmant. Le combo recherché pour ce mois.
Le nouveau, Keigo Igashino (polar): L’étrangeté relative du Japon ne sauve pas un polar médiocre. Au milieu du livre, je me suis rappelée que je ne lisais pas de polar (ou de roman policier) parce que c’est très chiant la recette est souvent trop évidente du genre “Où est l’oeuf dans l’oeuf au plat ?”. Oh, ça vire surréaliste.
Naufrages, Akira Yoshimura (roman… historique? Contemporain?): Déprime sur fond de Japon oublié. Les charognes se cachent pour mourir. A ne pas lire quand il pleut non stop pendant 6 mois (réalité bretonne).
Aliène, Phoebe Hadjimarkos Clarke (roman contemporain fantastique): Intriguant, déroutant, très beau. La découverte littéraire de ce mois.
Junk food, Emilie Gleason (BD/ Roman graphique/ enquête): Malin et bizarre. Ce serait quoi de la junk littérature ? La romance ? Les polars ? Tout ce qui se consomme vite et crée une addiction ?
The future, Naomi Alderman (roman contemporain): aussitôt ouvert, aussitôt refermé car je baignais dans cet univers à cause de mes lectures pour le travail. Je vous en reparlerai cet été. Peut-être. J’ai aimé ses précédents romans, The Power et Disobedience. J’espère qu’il y aura des lesbiennes qui lancent des éclairs dans celui-ci. (Cette blague ne fonctionne que si vous avez lu The Power ou Disobedience).
Gotham handbook, Paul Auster & Sophie Calle (manuel de mauvaise conduite): Sophie Calle demande à Paul Auster de lui écrire un guide pour la vie new yorkaise. Elle l’applique plus ou moins à la lettre et relate (et photographie) son expérience. Vraiment charmant. Pour l’anecdote,la photographe officielle de Macron m’avait invitée à faire une expo Sophie Calle quand on était ados. Ahahahah. (Rire étranglé par les forces de l’ordre).
Février 2024:
Doppelgänger, Naomi Klein (essai): Génialissime, un essai à relire et relire. Si vous connaissez le contact de qui la publie en France et que sa traductrice officielle est occupée, je suis prête.
Robbie, Emilie Gleason (BD): Quand on aime, on ne compte pas. J’ai beaucoup aimé, mais il me semble que le public ciblé est plutôt ado.
Ready or not, Cara Bastone (romcom) : comédie romantique plutôt comique, mais avec un pregnancy kink (que je n’ai pas donc). Si vous ne savez pas ce qu’est un pregnancy kink, n’utilisez pas google.
After the kiss, Lauren Layne (romance ersatz SATC): j’avais besoin de me laver le cerveau après une énième relecture de mon manuscrit. Cela n’a pas fonctionné.
Say nothing, Patrick Raden Keefe (essai qui fait pleurer) : Brillantissime. J’en ai parlé dans la NL. A consommer avec la série Derry Girls pour contrebalancer les pleurs.
Capote’s women, Laurence Leamer (essai pour bitcher): lu en prévision de la prochaine série de Ryan Murphy dans son cycle “Feud”. Délicieux gossip girl historique, avec Truman Capote dans le rôle de gossip boy. Qui est Serena ?
Les certitudes du doute, Goliarda Sapienza (roman pas contemporain): Très mélancolique. L’écart d’âge entre les personnages est un peu grand avec toujours le prétexte de la maturité (ça reste problématique, même dans une relation lesbienne au cas où vous ayez un doute).
Prison, Emmy Jennings (roman): Un beau livre étrange. L’impression d’entendre ma grand-mère me parler, sauf que ma grand-mère n’a pas fait de prison (mais elle était super catho, comme Emmy en fin de vie).
Là, j’ai eu besoin de me re-nettoyer le cerveau après une première correction de manuscrit et j’ai lu 3 romances, (Eloisa James et Beth O’ Leary) mais vraiment, ça n’a pas fonctionné. L’impression désagréable d’avoir mangé un truc qui ne passe pas. En plus, c’était pile le mois de la gastro à la fac.
The Second body, Daisy Hildegard (essai sans notes de bas de page) : Lu parce que Naomi Klein le citait. J’ai pensé à “The high house” - roman collant de fin du monde-. La collection qui publie cet essai s’appelle Fitzcarraldo et elle publie plein de titres étranges (j’en lis un en ce moment…).
Sainte Marguerite-Marie, Clémentine Beauvais (biographie/autobiographie): Enceinte d’un catho tradi (je parle du père, on ne sait pas encore pour l’enfant), l’autrice prend le prétexte d’une biographie de sa sainte aïeule (oui oui) pour réfléchir sur son féminisme et sa grossesse. Un bon cas de l’intime et du politique. Un texte palimpseste et l’impression désagréable que ce genre d’oeuvre sert à rendre “cool” la religion catholique plus que l’autrice qui se questionne à son sujet.
Mars 2024:
Tabor, Phoebe Hadjimarkos Clarke (roman): Livre de fin du monde bizarre-charmant avec des lesbiennes et des Mathieu/Pierre/ <insérez le nom d’un type lambda> qui sont forcément perfides. Offert par mes étudiant·e·s.
La Castiglione: vies et métamorphoses, Nicole G. Albert (biographie): les biographies comme les biopics, s’ils n’ont pas un angle, font vite pompier. Mais j’ai aimé. J’en retiens que la Castiglione aimait se déguiser et prendre des photos de ses chiens morts. Une influenceuse circa 1857 (sa brève heure de gloire, heureusement qu’il reste les photos des chiens).
Là, j’ai lu 3 nouvelles gratuites (romances) de Christina Lauren, Sally Thorne -qui avait écrit un premier roman hilarant- et Jasmine Guillory: ça y est, je suis définitivement allergique aux romcoms hétéros. Heureusement, il me reste les robots, les dinosaures et Tom Cruise (j’espère !) pour me défroisser les neurones.
Salvaged, Madeleine Roux (SF champignon): De l’espace et des champignons. Et là, une romance qui n’ajoute rien à l’intrigue. On parle bien de champignons, pas de mycoses. Quoique. Malheureusement, personne ne m’entend crier “Ras le bol des romances !!!”dans l’espace.
Gideon the Ninth, Tamsyn Muir (SF): après 100 pages à me dire “je ne comprends pas tout, mais j’adore”, génial. De la SF hilarante et touchante. Bouillonnant, brillant et salissant. Je signe pour le prochain tome (en cours).
The Prisoner’s throne, Holly Black (fantastique): C’est la fin d’une duologie, mais trop de monologue en mode « oui, mais non, mais me croira-t-il, mais je ne suis pas qui je parais…» En fait, j’avais mal compris, c’est encore une romance. J’aurais aimé que l’héroïne mange le héros. Littéralement.
The Coldest girl in Cold town, Holly Black (urban fantasy): Une histoire de vampire. Bien, si on aime les hommages aux vampires (le méchant vampire s’appelle Lucien Moreau, il est blond et il est joué par Tom Cruise).
The Darkest part of the forest, Holly Black(fantastique) : C’est mignon, mais très ciblé YA. Ou alors mon coeur s’est définitivement asséché ces derniers mois (possible).
Je vous remercie pour votre lecture, à dans trois mois pour un nouveau book club de qualité. J’attends vos recommandations (et commentaires avisés).
Hahaha bravo d'avoir tenu jusqu'à la fin de 4th wing. Je n'ai pas eu ta persévérance...